Retraites : un « bon sens » éloigné de la réalité
« Quand on vit plus longtemps, on peut travailler plus longtemps ! » C’est ce que vient, malheureusement de déclarer notre ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine.
Cette phrase est inexacte. Dans le secteur privé, « on » ne peut pas
travailler plus longtemps tout simplement parce que, dans la très grande
majorité des cas, les salariés qui prennent leur retraite ne sont plus
au travail.
60 % des salariés du secteur privé sont en maladie, en invalidité ou
au chômage lorsqu’ils prennent leur retraite : comment pourraient-ils
choisir de travailler plus longtemps ? L’affirmation de Marisol Touraine se présente comme découlant du bon sens mais n’a rien à voir avec la réalité sociale.
Allonger encore la durée de cotisation amènerait les ¾ des salariés du
secteur privé à ne plus être au travail quand ils partiront en
retraite.
Pourquoi faudrait-il, de toute façon, obliger des salariés
âgés qui ont le droit au repos, à rester au travail, alors que des
centaines de milliers de jeunes sont à la recherche d’un emploi ?
Il n’y a pas de « tabou » pour équilibrer nos retraites affirme
notre gouvernement. Il y a pourtant, hélas, un « tabou », c’est celui de
l’augmentation des cotisations patronales dont notre
gouvernement ne semble pas vouloir entendre parler, si ce n’est de façon
infinitésimale. Le pacte de compétitivité a créé ce « tabou » depuis
que 20 milliards d’euros ont été accordés aux employeurs sans aucune
contrepartie. Il ne paraît plus possible, depuis ce « pacte », de
toucher aux profits des entreprises et donc, en fin de compte, aux dividendes (170 à 180 milliards par an) versés aux actionnaires des grands groupes.
Ce choix est injuste et amplifie la récession parce que les actionnaires ne consomment qu’une faible partie de leurs revenus.
Ce choix est dangereux parce qu’il va permettre à ces dividendes
d’aller gonfler, comme avant la crise de 2007-2008, de nouvelles bulles
spéculatives.
Ce choix, enfin, est dramatique pour l’avenir de la gauche au
pouvoir. Le Medef ne fera rien pour aider notre gouvernement, quelles
que soient les concessions qui lui seront faites. Dès que les décrets
d’application de la loi Sapin (l’Ani) auront sécurisé les licenciements,
le patronat multipliera les plans sociaux. Le Medef fera tout pour que la gauche se discrédite auprès de son électorat, pour que la droite puisse revenir au pouvoir et faire une politique encore plus favorable au patronat.Il faut revenir sur un choix aussi néfaste que celui du «
pacte de compétitivité » qui empêche toute augmentation des cotisations
patronales, que ce soit pour les retraites, la maladie ou la famille et
coupe le gouvernement de gauche de sa base sociale, le salariat.