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15/03/2012

DEMOCRATIE & SOCIALISME

La lettre de Démocratie & Socialisme

Grèce : Le plan de sauvetage des banques

La réalité est très loin des images d’Epinal qui nous présentent le « plan de sauvetage de la Grèce » comme un exercice d’équilibre entre les sacrifices « consentis » par le peuple grec et les « sacrifices » des banques. Les sacrifices ne sont nullement « consentis » par le peuple grec qui multiplie grèves et manifestations. Les « sacrifices » des banques ne sont en rien des sacrifices. La Grèce est loin d’être sortie d’affaire, au contraire. Quant à la crise de la dette publique européenne elle resurgit maintenant sous d’autres formes, tout aussi dangereuses.
Le « sacrifice » des banques
Les créanciers privés et les banques qui sont les principales créancières privées de la Grèce se sont-ils « sacrifiés », comme le proclament à grands renforts de violons plaintifs la quasi-totalité des médias, en « effaçant » 53,5 % de leurs créances, c’est-à-dire 107 milliards d’euros ?
Il suffit pour répondre à cette question d’imaginer ce qui serait advenu en cas d’impossibilité pour la Grèce de rembourser ses créanciers. La Grèce n’aurait pas obtenu les 130 milliards d’euros versés par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le FMI. Elle n’aurait donc pas pu faire face au remboursement de ses obligations arrivées à échéance (14,5 milliards d’euros à la fin du mois de mars). La panique aurait gagné les marchés financiers et se serait immédiatement étendue aux titres des dettes publiques italiennes et espagnoles qui représentent un total de près de 3 000 milliards d’euros en grande partie détenus par les banques et les assurances de l’Union européenne.
C’est donc pour sauver leurs créances de près de 3 000 milliards d’euros et leur propre peau (une crise bancaire aurait immédiatement suivi ce défaut grec), que les banques et les assurances européennes ont accepté de « perdre » 106 milliards d’euros.
Ensuite, sur les 130 milliards soi-disant versés par le FESF et le FMI pour « aider la Grèce », 25 milliards d’euros seront aussitôt utilisés à recapitaliser les banques grecques et retourneront donc aux banques. Ensuite, la valeur des obligations grecques n’avaient plus rien à voir avec leur valeur d’émission. Une obligation de 100 euros lors de son émission (sa valeur faciale) ne valait plus sur le marché secondaire (la bourse) que 10 euros dans le meilleur des cas. Les nouvelles obligations reçues par les banques et les assurances en contrepartie de leurs anciennes obligations auront une valeur de 46,5 % de la valeur faciale des anciennes obligations. Soit une valeur de 46,5 euros pour une obligation de 100 euros qui ne valait plus que 10 euros sur le marché boursier. Un cadeau, donc, de 36,5 euros par obligation de 100 euro s pour les banques !
Ensuite, les banques pourront faire jouer les assurances, les fameux CDS (Credit Default Swap) qu’elles avaient prises sur la dette publique grecque. Certes, d’autres banques devront cracher au bassinet les 3,2 milliards d’euros concernés mais se sont essentiellement des banques anglo-saxonnes, Morgan Stanley notamment.
Les banques et les assurances européennes s’étaient de toute façon déjà défaussées d’une bonne partie des titres de la dette publique grecque qu’elles avaient acquises aux dépens de la Banque centrale européenne (BCE) et du FESF. Un nouveau transfert, d’une rare discrétion, des dettes privées vers les dettes publiques, après celui de 2008-2009.
Les banques européennes avaient investi en titre de la dette publique grecque une partie des centaines de milliards d’euros que la Réserve fédérale américaine et la BCE leur avait fourni à taux zéro lors de la crise bancaire de 2008. Grâce à ce plan de sauvetage, elles auront sauvé l’essentiel de leurs fonds malgré l’échec de leur spéculation. Ce sera aux peuples européens de payer la facture puisque les dettes de la BCE et du FESF sont garanties par les Etats de l’Union européenne.
A peine signé, le traité Merkozy ne peut déjà plus s’appliquer
A peine le pacte budgétaire était-il signé (et non ratifié), le 2 mars, par 25 pays européens, que les Pays-Bas et l’Espagne annonçaient qu’ils ne pourraient pas l’appliquer.
Le pays le plus acharné à imposer la « règle d’or » du pacte budgétaire de Merkozy, les Pays-Bas, annonçait que son déficit public atteindrait 4,5 % du PIB en 2012 et 4,1 % en 2013. Très loin des 3 % auxquels le gouvernement des Pays-Bas s’était engagé.
Le chef du gouvernement conservateur de l’Espagne annonçait, lui aussi, qu’il ne pourrait tenir les objectifs fixés par le traité Merkozy. Le déficit public s’élevait à 8,51 % du PIB espagnol en 2001 et Mariano Rajoy ne voyait pas comment il pourrait atteindre les objectifs de 4,4 % en 2012 et de 3 % en 2013.
Les malheurs des oligarques européens ne s’arrêtent pas là. Les marchés financiers semblent maintenant comprendre (à la différence de Sarkozy) que, sans croissance économique, la détention des titres de la dette publique portugaise sera de plus en plus risquée. Et comme les prévisions de croissance négative au Portugal dépassent les 5 % en 2012, le taux de rendement des obligations portugaises à 10 ans atteignent maintenant 12,45 %. Ce qui rend illusoire la possibilité d’un retour du Portugal sur les marchés financiers en 2014. Il ne restera plus alors au Portugal que deux solutions : faire défaut de sa dette ou demander un nouveau prêt à la Troïka. Le Portugal apparaît donc maintenant comme le nouveau maillon faible de l’Union européenne. Pire que tout, pour les oligarques européens, la démocratie qu’ils veulent à tout prix mettre au pas, leur fait obstacle dans trois pays européens.
L’Irlande où l’annonce d’un référendum sur le traité Merkzoy leur à fait l’effet d’une douche glacée.
La France où l’élection présidentielle pose un gros problème à Merkozy dans la mesure où l’élection de François Hollande signifierait la disparition de la moitié de ce duo de droite et la volonté du nouveau gouvernement français de renégocier le traité.
L’Allemagne elle-même, enfin, puisque sa constitution exige une majorité des 2/3 pour ratifier le traité européen alors qu’une partie de la coalition de droite refuse le traité (pour ne pas « aider » ces horribles Grecs) et que le SPD et les Verts posent leurs conditions à ce vote : l’adjonction d’un volet destiné à assurer la croissance économique.

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